jeudi 11 mai 2017

Caravansérail



Nous roulons bon train vers l’Est sur l’excellente route traversant longitudinalement le plateau du Capaddoce. Devant nous s’étale une vaste plaine verdoyante bordée de moyennes montagnes aux sommets encore enneigés. Entre les parcelles agricoles, de majestueux peupliers, comme si les hommes avaient voulu agrémenter ce paysage tout en profondeur d’une note de verticalité. Peut-être aussi pour impressionner les commerçants empruntant cette route de la soie, fil d’Ariane entre l’Asie et l’Europe.
Même si les temps ont bien changé, à l’époque du transport aérien et de l’économie numérique, le lien existe toujours pour les échanges de certaines marchandises. Les camions ont succédé aux animaux de bâts. Le chemin est maintenant une large route au long de laquelle les caravansérails sont devenus des garages-stations-services pour poids lourds, restaurants et hôtels bon marchés pour les chauffeurs. C’est aussi le lieu de commerce et de rencontre des paysans et bergers du secteur, le genre de lieu où il fait bon s’arrêter respirer toute cette agitation. Nous en profitons pour faire le plein et la halte déjeuner dans une gargote prisée par ces gens rudes et authentiques toujours curieux de connaître notre destination, eux pour qui l’Eldorado est plutôt à l’Ouest. Alors à quoi bon aller perdre son temps dans le Caucase ?

La large vallée se rétrécie doucement et la route grimpe régulièrement pour franchir un premier col à plus de 2000 mètres. Ma moto marche mal. De nombreuses ratées doublées de désagréables pertes de puissance. A l’arrêt suivant je consulte Djo pour qui la réponse est évidente : les effets de l’altitude. J’avoue ne pas être totalement convaincu (plus exactement satisfait) mais n’ai pas de meilleurs argument. Nous en profitons pour refaire le plein et prendre un nouveau café dans un gourbi au centre du village. Au beau milieu d’une salle crasseuse trône un poêle sur lequel est posé un samovar en cuivre. Tout autour, des tables où sont assis des hommes brins au cheveux brillants, barbus, la peau tannée. Tandis que l’on nous dévisage, un homme à l’air affable nous invite à boire un thé. Moment d’échange agréable dans un anglais approximatif mais volontaire, avec ce vétérinaire venu travailler ici près des éleveurs des hauts plateaux. Il est heureux, même si sa famille réside à Istanbul. Sous l’œil bienveillant du patron, avec un certain succès un cireur de chaussures propose ses services aux clients.

L’après-midi avance. Il est temps de repartir. Sous un ciel menaçant, nouveau col à 2400 m. La moto marche de nouveau normalement. Sans doute l’essence.
Nous terminons à Oltu à la nuit tombante. Comme tous les soirs depuis que nous sommes entré en Turquie, l’orage menace. Le temps de trouver un hôtel minable est c’est le déluge. Seuls les chiens errants restent se faire tremper, molosses assez impressionnants ayant fort mauvaise réputation auprès des marcheurs.

Demain nous devrions entrer en Géorgie. La Caucase approche à grands pas.



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